La Cour des Comptes a récemment proposé des mesures drastiques pour réduire le déficit de la Sécurité Sociale, qui pourrait atteindre 17,2 milliards d’euros en 2027. Parmi ces mesures, l’arrêt de l’indemnisation des arrêts de travail de moins de huit jours a suscité de vives réactions.
Cette proposition, jugée « jusqu’au-boutiste » par certains membres du Sénat, reflète un effort pour maîtriser les dépenses sociales qui ont explosé ces dernières années. Mettons la lumière sur les différents aspects de ce débat houleux.
Un déficit croissant et des propositions radicales
En 2023, le déficit de la Sécurité Sociale a atteint 10,8 milliards d’euros. La Cour des Comptes alerte sur une dégradation continue de cette situation, avec des prévisions atteignant 17,2 milliards d’euros en 2027. Pour contrer cette tendance, elle propose des mesures visant à réduire les dépenses d’indemnisation des arrêts de travail (arrêts qui ne concernent pas que la maladie mais également les accidents. A ce sujet evrps explique toute l’importance de la prévention, mais c’est un autre sujet…), qui ont augmenté de plus de 50 % entre 2017 et 2022, atteignant 12 milliards d’euros dans le régime général.
Parmi les mesures évoquées, la Cour suggère la réduction de la durée maximale d’indemnisation de trois à deux ans, une augmentation du délai de carence de trois à sept jours, ainsi que l’arrêt de l’indemnisation des arrêts de travail de moins de huit jours. Ces propositions visent à réduire significativement les coûts, mais elles ont aussi suscité une levée de boucliers.
Critiques et réactions au Sénat
La sénatrice LR Corinne Imbert, rapporteure de la branche Maladie du budget de la Sécurité Sociale, a qualifié ces mesures de « jusqu’au-boutistes« . Elle souligne que « l’arrêt de l’indemnisation des arrêts de travail de moins de huit jours ne rapporterait que 470 millions d’euros, bien moins que l’augmentation du délai de carence à sept jours qui se situe autour d’un milliard ». Effectivement, cette mesure, selon elle, va beaucoup trop loin pour peu d’économies.
De surcroît, Marc Sanchez, Secrétaire général du syndicat des Indépendants et des TPE (SDI), a réagi en affirmant que cette mesure ne changerait en rien la pratique des arrêts de courte durée, mais transférerait à l’entreprise la prise en charge de cinq journées supplémentaires d’arrêt maladie. Son syndicat privilégie plutôt la mise en place « d’un délai de carence d’un à deux jours d’ordre public qui interdira aux entreprises de prendre en charge les salaires sur ce laps de temps ».
Le débat sur les niches sociales et les mesures alternatives
La Cour des Comptes ne s’est pas limitée à la question des arrêts maladie. Elle a aussi examiné les recettes de la Sécurité Sociale, en ciblant les « niches sociales des compléments de salaire« . Le rapport explique que le financement des complémentaires santé, la prévoyance et retraite supplémentaire, les titres-restaurants, ainsi que le partage de la valeur comme l’intéressement ou la participation, ne cessent de croître, au détriment des salaires et des cotisations sociales.
En conséquence, les pertes de recettes pour la Sécurité Sociale entre 2018 et 2022 ont atteint 8,1 milliards d’euros, un montant supérieur à la dégradation des déficits sociaux hors covid (6,6 milliards). Une autre piste d’économies porte sur une meilleure régulation des médicaments anti-cancéreux innovants. La dépense de l’Assurance maladie pour ces médicaments a atteint 5,9 milliards d’euros en 2022, et la Cour suggère la mise en place d’un réseau d’organismes de recherche indépendants pour évaluer les coûts et les bénéfices des nouveaux médicaments.
Ainsi, le rapport de la Cour des Comptes propose des solutions diverses et parfois controversées pour réduire le déficit de la Sécurité Sociale. Le débat reste ouvert et intense au sein du Sénat et des différents acteurs sociaux, chacun ayant des visions et des intérêts divergents quant aux meilleures méthodes pour atteindre cet objectif.